Mardi 21 Avril 2015
L’absence de preuve de l’originalité d’un logiciel fait échouer l’action en contrefaçon

Citation : Cabinet Caprioli & Associés, L’absence de preuve de l’originalité d’un logiciel fait échouer l’action en contrefaçon, www.caprioli-avocats.com

Date de mise en ligne : 21 avril 2015

Depuis trente ans, les logiciels sont protégés par le droit d’auteur dès lors qu’ils présentent le caractère d’originalité, condition nécessaire et suffisante à cette protection. Ainsi, l’auteur d’un logiciel ou tout au moins le titulaire des droits, disposant d’une exclusivité sur l’exploitation du logiciel pourra se défendre de tout usage par un tiers par l’action en contrefaçon (art. L.335-3 du Code de propriété intellectuelle). Un arrêt de la Cour d’Appel de Paris du 24 mars 2015 (disponible sur le site www.legalis.net) vient préciser certaines conditions pour rapporter cette preuve et ainsi faire prospérer une action en contrefaçon.

En l’espèce, le titulaire des droits sur un logiciel déposé auprès de LOGITAS en 2011 et reprochant à un site de téléchargement légal de musique sur l’internet d’exploiter une copie servile dudit logiciel, fait dresser des procès verbaux en 2011 et diligente des opérations en saisie contrefaçon (dûment autorisées par le Juge) dans les sociétés liées au site en 2012. En juin 2012, le titulaire des droits sur le logiciel assigne en contrefaçon les différentes sociétés et personnes en cause principalement (art. L.122-6 et L.335-3 du Code de propriété intellectuelle).

En première instance, les juges vont prononcer l’irrecevabilité de l’action en contrefaçon considérant que le demandeur n’était pas titulaire de droit sur le logiciel. Ils le condamnent notamment à payer des dommages et intérêts aux sociétés exploitant le site ainsi qu’aux entiers dépens. Suite à l’appel formé par le demandeur, la Cour d’Appel infirme le jugement de première instance en ce qu’il déclare l’action irrecevable. En revanche, il confirme que la preuve de l’originalité du logiciel n’est pas rapportée par le titulaire des droits dès lors que celui-ci fournit une simple attestation de dépôt chez LOGITAS. Cet arrêt permet de faire un rappel sur l’action en contrefaçon en matière logiciel et notamment deux points : les conditions de recevabilité de l’action et la nécessaire preuve et ses modalités afin que cette action prospère.

Sur la recevabilité de l’action, la Cour d’Appel vient sanctionner, de manière opportune, le jugement de première instance. En effet, pour agir en justice, une personne doit avoir un intérêt (art. 31 du Code de procédure civile) faute de quoi l’action sera déclarée irrecevable (art. 122 du Code de procédure civile). Ainsi, concernant l’action en contrefaçon, c’est le titulaire des droits sur le logiciel qui disposera de cet intérêt à agir. Par une étude des différents documents qui lui ont été soumis (contrat, compte de société…), la Cour relève que le demandeur était bien titulaire des droits dont il entendait assurer la défense : l’action était donc recevable. Rappelons par ailleurs que la recevabilité d’un action en contrefaçon de droit d’auteur n’est pas soumise au respect de la condition d’originalité du logiciel puisque « l’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action » (Cass. civ. 1ère., 17 mai 1993, n°91-15761).

Enfin sur le bien fondé de l’action contrefaçon, ensuite, la Cour d’Appel va conclure à son rejet. En effet, cette action, destinée à protéger des droits de propriété intellectuelle est conditionnée elle-même par l’existence d’une protection légale. Ainsi, une action en contrefaçon ne pourra aboutir dès lors qu’un logiciel ne présentera pas de caractère original, celui-ci se traduisant par « les choix opérés témoign[ant] d'un apport intellectuel propre et d'un effort personnalisé de celui qui [a] élaboré le logiciel » (Cass. 1ère civ ., 17 oct. 2012, n°11-21.641). En l’espèce, la Cour ne va pas prononcer une absence d’originalité mais un défaut de preuve de celle-ci. En effet, le demandeur se borne à fournir une attestation en anglais (donc inutilisable devant les Juges français) de séquestre d’une société de dépôt afin de prouver l’antériorité de ses droits. L’action en contrefaçon ne pouvait donc pas aboutir.

Cette affaire illustre parfaitement les moyens de défense à la disposition d’une personne pour contrer une action en contrefaçon : d’abord essayer de démontrer l’absence d’intérêt à agir du demandeur en mettant en doute la titularité de ses droits d’auteur puis, dans un second temps, réfuter l’existence même du droit en démontrant qu’il ne répond pas aux conditions de fond nécessaires ou encore à l’absence de preuve de cette démonstration. A contrario, avant toute action en contrefaçon, le demandeur devra s’assurer d’être le titulaire des droits sur le logiciel, de l’originalité de ce dernier et de fournir toutes les preuves nécessaires au juge.


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  • Ajouté : 21-04-2015
  • Modifié : 09-08-2017
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